Choeur

Dirigé depuis sa création par Florence Grivat Favre, le chœur Calliope a passé le cap de 45 ans de musique en 2020!
Après avoir exploré une partie du répertoire de l’oratorio, Calliope fait sa première incursion remarquée dans le registre scénique avec La Belle Hélène d’Offenbach, en 1983, au Théâtre municipal de Lausanne.

Au fil des années, les spectacles avec mises en scène s’enchaînent: The Fairy Queen (Purcell), Goyescas (Granados), le Roi Arthur et Didon et Enée (Purcell) et finalement Eros et Psyché (Lee Maddeford) une fantaisie musicale créée le 31 décembre 2007. Avec Denis Maillefer, Christophe Balissat, Diane Decker et Robert Bouvier pour les mises en scène de ces divers spectacles. En 2014, c’est François Rochaix qui met en scène une création du compositeur Guy Bovet sur le thème du cirque.

Son goût pour les spectacles n’empêche pas le chœur Calliope d’offrir toute une palette de concerts de texture plus classique, a capella ou avec accompagnement d’orchestre comme les Vêpres de Rachmaninov, le Requiem de Theodorakis, le Pèlerinage de la Rose de Schumann, le Requiem de Fauré, le Stabat Mater de Haydn, etc.

Calliope a aussi eu l’occasion de s’associer à plusieurs reprises avec des formations professionnelles: en 2003 pour la Cantate Saint-Nicolas de Britten avec l’Orchestre de Chambre de Lausanne, et en décembre 2005 pour la Messe en mi bémol de F. Schubert et le Requiem de G. Finzi avec le même ensemble à la Cathédrale; en octobre 2008 avec le Sinfonietta de Lausanne pour le Requiem d’Antonin Dvorak à la salle Métropole à Lausanne. Sous la baguette d’Hervé Klopfenstein et en collaboration avec le chœur Laudate Deum, il a donné le Requiem de Verdi au Victoria Hall de Genève et à la Cathédrale de Lausanne en novembre 2013.

Il consacre un programme à trois cantates de Bach interprété en 2015 à l’église Saint-François à Lausanne puis à Lisbonne au moment de l’Ascension. A l’automne, il retrouvait l’Orchestre de Chambre de Lausanne pour le Requiem de Mozart et un oratorio de Fanny Mendelssohn à la Cathédrale.

En mai 2016, Calliope interprétait une œuvre d’actualité, la Messe pour la Paix – l’Homme armé de Karl Jenkins à l’église Saint-Jean de Cour à Lausanne, avec la participation d’un petit chœur d’enfants de Thierrens.

Au début de l’année 2017, Calliope participe avec deux autres chœurs et l’orchestre Amabilis aux concerts du Messie dans les cathédrales de Lausanne et de Genève, éclairées par des centaines de lumignons. Un programme dédié à Bach et Mozart, donné à Mézières puis à Split dans sa cathédrale, occupe la belle saison 2017. L’année 2018 est dédiée à la Messe en si de Jean-Sébasien Bach, interprétée avec l’Ensemble baroque du Léman à Romainmôtier, Moudon et la Cathédrale de Lausanne. Changement de style en 2019, avec la MisaTango du compositeur contemporain argentin Martín Palmeri, à Lausanne et Verbier; et en décembre 2019, le Gloria de Vivaldi et une «chantée» de Noël à l’église Saint-François à Lausanne.

 

Présentation de Florence Grivat Favre

Florence Grivat Favre, 2021

Florence Grivat passe son enfance à Lausanne dans une famille très mélomane (le dimanche matin c’était: «cantates de Bach» au déjeuner…). Après une maturité latin-grec, elle suit des études musicales au Conservatoire de Lausanne pour le piano et les branches théoriques, et le chant à Genève chez Arlette Chédel avec laquelle elle obtient son diplôme.

En parallèle, elle développe une activité de cheffe de chœur en fondant le chœur Calliope en 1975. Cette vingtaine de copains lui serviront (merci à eux) de laboratoire expérimental pédagogique… Elle prépare les chœurs de nombreux spectacles lyriques, ce qui l’amène à créer en 1995 l’association Opéra Off afin de promouvoir des opéras méconnus (comme Curlew River de Britten ou Goyescas de Granados). Elle associe souvent le chœur Calliope à ses projets (La Belle Hélène d’Hoffenbach) ainsi qu’à des créations : Éros et Psyché composé par Lee Maddeford et «c’est quoi ce cirque?» de Guy Bovet.

Elle forme des adultes à l’art du chant, mais elle aime également transmettre aux jeunes sa passion pour la musique et elle se réjouit, pour marquer la fin de son enseignement à l’école de Thierrens, de monter en juin 2022 la comédie musicale «Annie» avec le chœur d’enfants.

Depuis douze ans, elle dirige le chœur mixte l’Aurore à Chapelle-sur-Moudon dans un répertoire de chansons populaires et de variété. C’est son «chœur de campagne» alors qu’avec son «chœur de ville, Calliope», elle pratique plus le répertoire d’Oratorio. Elle rêvait de les réunir lors d’un concert, ce qui a été fait à Noël 2019 autour du Gloria de Vivaldi.

Avec l’Aurore, sera monté un spectacle en mars 2023 pour les quarante ans de la chorale d’après un texte du slameur Narcisse, sur une musique de Lee Maddeford. Avec Calliope, elle prépare un Oratorio profane composé par Blaise Méttraux sur le texte de Blaise Cendrars «Pâques à New-York» qui sera créé le 9 octobre 2021.
Son credo: travailler sérieusement sans se prendre au sérieux et ne jamais oublier que le seul salaire des chanteurs amateurs, c’est … le plaisir!

 

 

Cheffe depuis 40 ans: entretien avec Florence Grivat

«Chanter, c’est harmoniser les voix et les êtres»

Quand tu as lancé les «Gais Pinsons», imaginais-tu une seconde que l’aventure allait durer 40 ans?

Absolument pas. Je ne réalise toujours pas que cela fait 40 ans… Quand on avance sans arrêt, qu’on enchaîne les projets, on ne regarde pas en arrière.

Pourquoi un chœur? Pourquoi pas un groupe de musique?

Parce que chanter, c’est ce que je sais faire! Diriger, j’avais vu d’autres le faire, chanter, c’était le contenu de mes études, être au piano et accompagner, je savais le faire. Donc c’était la forme d’activité qui mettait le plus à profit mes compétences. Et mes envies.

Diriger, c’est aussi être la cheffe du groupe. Est-ce que tu avais déjà l’âme d’une leader?
Modestement, je pense que oui. Il suffit de demander à mes camarades d’école, quand je les emmenais nettoyer les Grangettes en bottes de caoutchouc… J’ai été scout, cheffe cadet, donc être leader a toujours été un trait de mon caractère. La présidente actuelle du chœur, Martine Jaquet, me surnomme parfois «la monarque», et pas toujours éclairée… (rire)

D’où vient ce besoin de chanter?

C’est familial. Ma mère a chanté durant des années dans un chœur, une grande tante avait une voix magnifique. Et avec mes deux sœurs, lors de nos départs en vacances, nous avons braillé de Lausanne à Gênes, pour le plus grand bonheur de mes parents. Nous avons toutes les trois fait du piano et j’ai rejoint le chœur de mon école. Je vis continuellement avec la musique, que je sois en train de gratouiller mon jardin ou de promener mon chien. La musique est là en permanence dans ma tête, mais elle ne m’empêche pas de me ressourcer.

Chanter dans un chœur, ce n’est pas comme faire du chant en solo.

C’est ce que je trouve formidable: regrouper le plaisir de chanter et harmoniser les voix et les êtres, qui peuvent venir d’univers très différents. J’adore ce mélange: nous unissons nos voix pour une cause commune. Le chant a aussi l’avantage de ne pas exiger des années d’apprentissage au Conservatoire: tout le monde peut chanter et éprouver rapidement de la joie.

«Tout le monde peut chanter»: c’est la philosophie que tu appliques au chœur Calliope. Il n’y a pas d’audition et certain-e-s choristes ne savent pas lire une partition.

C’est vrai que je trouverais dommage de se passer de l’énergie et de l’enthousiasme de quelqu’un qui aurait été bouleversé par un concert magnifique et voudrait chanter. Même si cette personne s’y met sur le tard et n’a pas de formation dans ce domaine. Cela exige que ceux qui déchiffrent bien acceptent d’être solidaires. Je ne suis pas élitiste. J’ai subi des chefs extrêmement exigeants, mais je suis persuadée qu’on n’accouche pas de nos plus beaux sons sous la terreur. C’est pourquoi je n’oublie jamais que les choristes ont une journée de travail derrière eux et qu’ils doivent trouver une satisfaction dans le chant.

Quelles sont les valeurs que tu veux transmettre?

En premier lieu, le plaisir d’aborder de la belle musique. C’est pourquoi je chante toujours moi-même les œuvres, car je ne suis pas fan de musique contemporaine avec des intervalles improbables, qu’on ne peut chanter qu’avec un diapason dans la poche et une technique spectaculaire. Je préfère le côté expressif du chant. En deuxième lieu, les valeurs humaines: toute activité qui regroupe des gens exige de la tolérance, de l’exigence, la recherche d’un équilibre entre l’harmonie et l’individualisme.

Un chœur, c’est aussi mettre tout le monde sur un même niveau et laisser les egos au vestiaire.

Oui, même si j’espère que les personnalités des gens peuvent toujours s’exprimer. Tout le monde doit tirer à la même corde pour atteindre le but commun. Nous sommes tous ensemble et c’est stimulant.

Du noyau de départ sont restés quelques choristes, mais sinon le chœur a toujours intégré de nouvelles personnes. Comment trouves-tu l’énergie pour répéter mille fois les mêmes indications?

Je la trouve surtout dans le plaisir de partager mes connaissances. Ou aussi dans l’excitation de réaliser qu’après une première lecture, je sens que nous progressons ensemble et que la mayonnaise prend. Et évidemment dans le côté humain: je me suis toujours retrouvée entourée de gens sympathiques! Donc je n’ai pas besoin de mobiliser une énergie particulière, cela me vient assez naturellement.

Une des spécificités du chœur Calliope, c’est aussi de ne pas se contenter d’un concert annuel, mais de monter des projets ambitieux.

Ce sont souvent des rencontres qui déclenchent ces projets. Des gens viennent parfois nous proposer des œuvres. J’aime les idées originales, qui permettent de décloisonner l’opéra et de le transporter ailleurs, comme ce que nous avions fait à la Cathédrale avec Les Funérailles de la Reine Mary, de Purcell. Le metteur en scène avait vidé la Cathédrale de tout le mobilier et nous avions installé de la tourbe sur le sol. C’était une expérience très forte pour le public… sauf éventuellement pour le spectateur qui était assis à côté de la grosse caisse! Nous avons aussi chanté pour protester lors de la fermeture d’une garderie à Lausanne, ou lors d’une manifestation contre les disparitions forcées en Algérie. A défaut de chanter comme l’Ensemble vocal créé par Michel Corboz, nous sommes partis dans des projets qui nous ont permis de nous différencier des autres chœurs lausannois et d’exister.

On peut donc réaliser de beaux projets avec un chœur d’amateurs.

Bien sûr. Un de mes credos, c’est le travail vocal. Avec un peu d’entraînement, nos voix se bonifient, notamment aussi grâce aux exercices de yoga que j’ai introduits dans nos mises en voix. Le chant, c’est physique, on s’exprime au travers de notre corps et de nos émotions. Mes plus grandes émotions artistiques, je les ai vécues en entendant des voix splendides à l’opéra. Je m’éclate en écoutant des duos de voix de femmes de Mozart ou de Verdi. Avec ça, pas besoin de drogue! Et mon enthousiasme est resté intact. Cela me bouleverse tout autant aujourd’hui qu’avant.

Certaines œuvres reviennent périodiquement dans le répertoire de Calliope, comme la Petite messe solennelle de Rossini. Pourquoi?

Parce que c’est une œuvre génialement expressive, presque humoristique, avec un accompagnement au piano et harmonium, donc parfaite pour de petites églises. Nous l’avons chantée très tôt avec l’enthousiasme de nos 25 ans, et j’ai trouvé que ce serait bien de la rechanter avec davantage de maturité.

Calliope a aussi chanté des compositeurs très peu connus.

Mon enthousiasme fait que je dis rarement non et que je ne regrette rien du tout! Lors d’un festival de voix sacrées au MAD (Moulin à Danses à Lausanne), nous avions chanté la messe d’un compositeur qui avait perdu son fils lors d’un braquage aux Etats-Unis et qui avait composé cela comme «thérapie». Il est venu jouer du saxophone avec nous et c’était très touchant. Sa musique n’était pas exceptionnelle, le MAD sonnait comme une boîte à chaussures, mais cela a quand même été un moment très émouvant. Quand il y a au moins un paramètre qui me touche, soit la musique, soit la personne, j’accepte.

N’as-tu jamais songé à diriger un chœur professionnel?

Non, jamais. Je ne suis pas carriériste et quand je suis avec des gens avec lesquels je m’entends bien, cela me convient. Quand je dois diriger des orchestres professionnels que je ne connais pas, je ne me sens pas à l’aise.
Je suis consciente de mes limites: je suis tombée dans la musique très jeune et je n’ai pas la formation qu’ont les chefs aujourd’hui, qui peuvent sauter d’un orchestre à un autre. J’ai trop besoin de liens affectifs pour pouvoir chanter, et c’est ce que je trouve chez Calliope. J’ai besoin qu’on m’aime!